La Bâtarde d’Istanbul de l’auteure turque Elif Shafak est un roman paru en 2006, il compte 378 pages. Il est traduit de l’anglais par Aline Azoulay. C'est une histoire turco-arménienne qui touche cinq générations.
Asya, la bâtarde d’Istanbul, fut élevée dans une famille de femmes. Elle a fait la connaissance d’Armanoush,
la belle-fille de son oncle, qui était de mère américaine de père arménien. En effet, elle arriva à Istanbul à la recherche de son origine arménienne. La famille de
son père était la descendance de survivants du génocide commis par les turcs de
l’empire Ottoman contre la minorité arménienne de Turquie en 1915. La grand-mère
d’Armanoush, Shushan, avait quitté son mari turc et son fils Levent pour rejoindre
son frère arménien en Amérique. Levent était le père de Zeliha, la mère d’Asya !
Elif Shafak pose la
question de la place de notre passé dans notre présent, et l’importance des
origines. Faut-il que la bâtarde d’Istanbul cherche son père ? Faut-il qu’Armanoush
cherche son identité arménienne, celle de ses ascendants ? Fallait-il que
Shushan, arménienne, quitte son mari turc pour aller chez son frère arménien ?
Fallait-il que Mustapha oublie sa culture turque quand il vivait en Amérique ?
C’est un récit
passionnant, très réel, proche du lecteur. A côté du sujet principal, Elif
Shafak nous régale avec de belles descriptions : dîner en couple,
petit-déjeuner en famille, salon turc, promenade à Istanbul, sons au bord du
ferry, Istanbul au petit matin..
Aussi, les détails seront
appréciés: nourriture, paroles d’une chanson, une moustache, des tatouages, les
titres de livres, un tapis, un bureau, une recette turque, une émission
télévisée, un chat…
Les Kazanci
Zeliha Kazanci, d’Istanbul,
osait sortit avec des mini jupes et des chemisiers ajustés. Elle avait
dix-neuf ans quand elle était tombée enceinte hors mariage. Elle était la
benjamine d’une fratrie de quatre sœurs.
Sa sœur Feride, était schizophrène. Les deux autres sœurs étaient Banu la grosse, et
Cevriye, professeur d’histoire. La mère s’appelait Gülsüm et la grand-mère
était Petite-Ma.
Les hommes de la
famille étaient tous morts jeunes, frappés par une malédiction. Ainsi quand
Gülsüm eut un garçon, Mustapha, il fut considéré comme un trésor. Elle l’envoya
étudier en Arizona aux USA pour le protéger de la mort par malédiction.
Rose et les arméniens
Rose, américaine, divorça
après un mariage avec un arménien, Barsam. Elle s'est remariée avec Mustapha, le turc. En fait, la famille
arménienne de son ex-mari, les Tchakhmakhchian, réprouvait les turcs. Ils
étaient les descendants de survivants du génocide des turcs contre les
arméniens en 1915.
La bâtarde d’Istanbul et sa famille
Asya Kazanci, la
fille de Zeliha, a su à l’âge de huit ans qu’elle était née bâtarde. Au fil des
années elle comprit qu’elle avait une famille anormale. A dix huit ans elle a
échoué une tentative de suicide. A dix-neuf ans elle se distinguait par sa
rationalité. Elle était distante de sa mère et de ses tantes. Elle aimait la
musique, la danse classique et la philosophie.
Tante Banu devint
une voyante. Ensuite elle déclara vouloir se consacrer à Dieu et devenir comme
les derviches d’antan. Ainsi elle s’enfonça dans sa solitude. Zeliha, toujours
séduisante, a ouvert un salon de tatouage.
Armanoush
Armanoush, la fille de Rose, a vingt et un ans . Elle aimait se rendre chez les Tchakhmakhchian, pendant des mois, à San Francisco, ils étaient affectueux.
Elle trouva refuge dans un cybercafé qui unissait des arméniens et des grecs descendants de Stambouliotes. Leur ennemi commun était « les turcs ». Ils abordaient la question de l’identité arménienne. Armanoush sentait son problème d’identité
« Son enfance fragmenté l’avait empêchée de s’inscrire dans une lignée, de trouver son identité ».
Elle leur exprima son désir de retrouver le passé
des siens en Turquie, en voyageant à Istanbul chez la famille de Mustapha.
Petite-Ma
Elif Shafak évoque, par le personnage de
Petite-Ma, la prière, le coran et la préservation du contre le mauvais œil.
Petite-Ma était
jeune en 1923 lorsque sa mère, veuve, avait émigré à Istanbul. Elle se maria, à
la traditionnelle, avec Riza Selim, ancien chaudronnier devenant fabricant de
drapeaux. Il avait un fils de sa première femme qui l’avait abandonné, il
s’appelait Levent. Ensuite Riza Selim a du choisir un patronyme : Kazanci. Son mari mourut de façon inattendue comme tous les
hommes Kazanci. Ainsi Petite –Ma vint à croire au mauvais œil.
Armanoush à Istanbul
A la recherche de
son identité arménienne, Armanoush débarqua en secret à Istanbul chez les
Kazanci. En effet elle était la belle-fille de Mustapha.
A Istanbul, Armanoush
fut étonnée de voir Zeliha avec sa mini jupe et sa sœur Banu avec son
voile ! Elle découvrit le charme du salon de la maison des Kazanci, les
turcs:
« …une peinture à l’huile bucolique représentant un paysage trop pittoresque pour être réel, un calendrier illustré de photos de hauts lieux de la Turquie, une amulette contre le mauvais œil, un portrait d’Atatürk en smoking secouant son chapeau en direction d’une foule hors cadre. Tous ces souvenirs et ces nuances vives de bleu, de bordeaux, de vert océan, de turquoise donnaient à la pièce cette atmosphère lumineuse qui ne devait rien aux lampes ni au soleil. »
A table, elle
remarqua des plats qui faisaient partie de la cuisine arménienne. Armanoush expliqua
que son arrière grand-père était sur la liste des intellectuels arméniens à
éliminer. Et elle raconta l’histoire de la déportation de sa famille arménienne
par les turcs de l’empire Ottoman en 1915. En outre elle était amie avec la bâtarde d'Istanbul.
Le passé et le présent
« Pour les Arméniens, le temps était un cycle au cours duquel le passé s’incarnait dans le présent et le présent donnait naissance au futur. Pour les Turcs, le passé s’arrêtait en un point précis, et le présent repartait de zéro à un autre point. Entre les deux, il n’y avait que du vide »
A la place de la maison de grand-mère Shushan, la grand-mère d’Armanoush, il y avait un immeuble. Un chef cuisinier avait expliqué à Asya, la bâtarde d'Istanbul, et Armanoush:
« Il reste peu de vieilles familles stambouliotes ici…Dans le temps la ville était si cosmopolite ».
Tante Banu
Tante Banu se lève la première avec l’appel à la prière de l’aube. Elle parlait avec ses djinn, Mer Amer et Mme Douce. Mer Amer la servait depuis plus de six ans. En effet elle lui demandait des événements, des secrets, pour répondre à l’attente des ses clientes. Mais la seule faveur personnelle était de lui demander le nom du père d’Asya, la bâtarde d'Istanbul.
Shushan
Hovhannes
Stamboulian, un arménien, écrivait un livre pour enfants, en secret. Sa femme
s’appelait Armanoush, et il avait trois garçons et une fille : Shushan, la
benjamine.
Des soldats turcs
vinrent chez l’écrivain avec l’ordre de fouiller la maison. En effet des
insurgés arméniens lisaient ses poèmes et se rebellaient contre le sultanat
ottoman. Varvant, le fils aîné, alla chercher l’oncle Levon et trouva son
apprenti chaudronnier Riza Selim. Mais oncle Levon était arrêté par les
soldats. Varvant ne trouva pas de secours.
« …même quand ils furent expulsés de la maison en pleine nuit par des soldats et qu’ils se trouvèrent sur la route, au milieu de milliers d’Arméniens épuisés, affamés, battus, cernés par des soldats à cheval… ».
Ainsi, les enfants devinrent des orphelins égarés sauvés ensuite par des missionnaires américains, ils demeurèrent à San Francisco.
Mer Amer
continua à raconter à tante Banu l’histoire de Shushan la grand-mère
d’Armanouch.
Le passé pour les arméniens et pour la bâtarde d’Istanbul
Armanoush présenta Asya, aux membres du cyber café. On soulevait la question du génocide passé et là Esya souleva le problème de son passé. Le passé est-il mort ou s’insère-t-il dans le présent ? Est-on responsables des crimes de nos pères ?
Shushan, l’arrière grand-mère de la bâtarde d’Istanbul
Banu avait une
broche en forme de grenade, son père la lui avait donnée, il l’avait héritée de
sa mère qui l’avait abandonné. Banu a su par la magie que cette broche avait
appartenu à Shushan.
Armanoush, après
l’arrestation de son mari, découvrit la broche en forme de grenade dans son
bureau à côté d’un manuscrit inachevé. Riza Selim Kazanci avait vu Shushan,
petite, dans un orphelinat. Il sut qu’elle était la nièce de son maître chaudronnier.
Alors il l’épousa et fut appelée Shermin Kazanci. Ils eurent un garçon : Levent.
Des années après, le
frère de Shermin venant d’Amérique se présenta et lui offrit la grenade en or.
Après une semaine elle voyagea vers l’Amérique laissant une lettre d’excuse et
la broche.
Banu refusa de
dévoiler à Armanoush le secret de sa grand-mère mais elle lui donnera la broche.
Mustapha
Mustapha avait violé sa sœur Zaliha il y a des années à la suite d’une dispute. Il mourut subitement à Istanbul. Après sa mort, Zeliha annonça à sa fille, la bâtarde d'Istanbul, qu’il était son père.
Citations :
Qu’importe ce qui
tombe du ciel, jamais nous ne devons le maudire
Si les réponses ne
t’intéressent pas ne pose pas de questions
Le passé n’est qu’un
lien dont il faut savoir s’affranchir
Ne me plonge pas à
la fois dans la connaissance et dans l’impuissance
Je ne peux pas
changer la direction du vent, mais je peux ajuster mes voiles pour toujours
atteindre ma destination
Le passé n’est
jamais mort et enterré
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